Des nouvelles des céréales panifiables à Oléron et à Belle-Île-en-Mer

Mi-novembre, l’équipe oléronaise est entrée dans la saison 2 de l’expérimentation de céréales panifiables sur l’île d’Oléron.  L’objectif est de sélectionner et de multiplier des variétés paysannes, cultivées en respectant l’environnement et qui seraient les mieux adaptées aux conditions agroécologiques de notre territoire, et à nos attentes en termes de panification.

En cette saison 2, c’est sur une parcelle de 350 m2 que nous avons réalisé les semis des 18 populations de blés issues de la saison précédente. Nous avons aussi semé 13 variétés de petit épeautre fournies par le CRB (Centre de Ressources Biologiques) et 2 variétés de seigle. Un bref retour en arrière sur la genèse de cette histoire permet de voir comment les relations inter-îles, mises en place par les membres du RAIA, peuvent avoir des conséquences très concrètes sur les filières agricoles sur nos îles.

Tout a commencé à Bréhat, aux rencontres inter-îles de novembre 2021 : l’association « Du grain au Pain, et pas que … » (DGAP), de Belle-Île-en-Mer, présente l’action qu’elle mène depuis deux ans en vue de la création d’une filière locale de céréales panifiables. Ils lancent en même temps un appel pour des informations sur la réhabilitation d’un moulin à vent producteur de farine. A ce moment-là naît l’idée d’un échange de savoir-faire entre Oléron et Belle-Île, sur les deux axes : expérimentation/production de semences et restauration d’un moulin.

En décembre 2021, le GEDAR Oléron initie une première rencontre qui permet à un agriculteur et un boulanger d’Oléron d’exposer leurs contraintes et leurs attentes à deux représentants de l’association belliloise. Après la visite du chantier du moulin de La Brée-les-Bains, la Communauté de communes de l’île d’Oléron présente les stratégies et les contacts mis en place pour la réhabilitation du moulin. Pendant deux jours, sur Oléron, en novembre 2022, ce sont 44 participants, essentiellement des deux îles, qui échangeront sur la concrétisation de ces projets sans oublier plusieurs visites de terrain. À la fin de ces journées, l’association DGAP offrira 25 sachets de leurs semences pour autant de micro-parcelles d’un m2. Elles sont mises au congélateur en attendant la suite.

Au cours de l’année 2023, un groupe multi acteurs se constitue sur Oléron (agriculteurs, bénévoles, meunière, boulangers) et un plan d’action est élaboré. L’expérimentation sera encadrée scientifiquement par une ex-ingénieure céréale de l’INRAE et par le CPIE local. Les contacts sont pris, dans le cadre d’un appel à projet, pour une demande de subvention auprès de la Région Nouvelle Aquitaine. Tout est en place en octobre 2023 … on attend la fenêtre météo qui permettra de réaliser les semis. Elle n’arrivera qu’en janvier 2024.

Après huit mois d’observations minutieuses et d’entretien régulier, ce sera la première moisson, à la main, … suivie du battage et du vannage (tout une aventure aussi). Les résultats de cette saison 1 ont dépassé nos espérances avec un rendement de x6 à x8. Aujourd’hui, après un tri des semences de chaque population, nous repartons pour la saison 2. On croise les doigts et on remercie toutes celles et tous ceux qui ont permis à ce beau projet d’avancer.

Le mot de Christine Nadreau, agricultrice à la ferme de La Josière :

« Effectivement cette action n’est pas arrivée là par hasard, comme « venant de nulle part » !
Depuis de nombreuses années les adhérents du GEDAR se rencontrent régulièrement, animés par l’envie de valoriser l’agriculture et le territoire d’Oléron. Projections de films, conférences, expo-photos, visites de fermes, partenariats avec les collectivités, accueil des nouveaux installés, promotion des circuits courts, réalisation participative de films sur le patrimoine agricole et insulaire, adhésion au RAIA sont autant d’actions fédératrices qui rassemblent agriculteurs et citoyens forts de toutes leurs connaissances et compétences.
C’est toute cette antériorité de participation, d’engagement, d’ouverture et d’intérêt qui fait le terreau d’un projet tel que celui-ci. Projet qui a toute sa place face aux défis qui nous attendent… »

Et pendant ce temps à Belle-Île, un bémol partagé : la saison 2023 a été médiocre pour les blés, la récolte a été maigre. « Nous n’avions plus de farine à vendre, alors il nous a fallu attendre la récolte 2024 ! La pluie de la saison a tout de même empêché l’optimisation des rendements sur ces cultures sans intrants chimiques (la pousse difficile dans les sols compactés, la rouille sur les feuilles, …) ».

Devant l’impact des conditions climatiques, de prédation, agronomiques, l’association DGAP a entrepris des travaux de fond pour relancer la filière céréalière et meunière à Belle-Île. Le pari du défrichage pour pourvoir poursuivre la consolidation de la mise en culture. Grâce à une aide financière de la fondation « Terre de liens » et les fonds propres de l’association, 7 hectares ont été défrichés. Ce sont autant de terres mises à disposition d’un agriculteur bellilois qui s’engage au côté de l’association et a en réserver une partie chaque année à la culture du blé. Des silos ont été construits par des membres de l’association pour assurer la protection des grains, leur ventilation avant leur mouture progressive au moulin à pierre de Maël, membre de l’association cultivateur, éleveur-fromager devenu meunier.

Un travail sur le sol fait l’objet d’une attention et d’un travail particulier pour « nourrir le blé » il faut une terre propice : remédier ou diminuer l’acidité des terres notamment défrichées, décompacter, choix voire construction des outils de culture adaptés …. Engrais verts, sable coquillier, amorce d’une collecte des coquilles consommées sur le territoire…

Autant de sujets de recherches pratiques d’expérimentation, de travail en commun et d’échanges à poursuivre avec vous chères oléronaises et chers oléronais !